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Depuis le 3 novembre dernier [2003], les arbres du parc Mistral de Grenoble sont occupés et habités afin d’empêcher la destruction d’une partie du parc Mistral. Plus de 300 arbres du « poumon vert » grenoblois, dont un vieil orme bicentenaire, devraient disparaître pour laisser place à un stade de foot géant. Ce terrain de jeux et de promenades privilégié représente un nouvel espace public en voie d’être privatisé…
Une campagne de protestation avait été lancée par des voies de lobbying et autres démarches politiques traditionnelles par l’association « SOS parc Mistral » sans parvenir à empêcher le projet. Alors que le démarrage du chantier s’annonçait imminent, trois personnes d’abord, rapidement rejointes par une bonne vingtaine d’autres, ont décidé de passer à l’action directe et d’occuper de manière permanente le terrain pour empêcher la venue des tronçonneuses et bulldozers. Une dizaine de cabanes dans les arbres, avec matelas et hamacs, espaces de vie et cuisinières, constitue maintenant un village en perpétuelle évolution relié par des chemins aériens avec une plate-forme à une vingtaine de mètres de hauteur.
Le soutien d’une partie importante de la population grenobloise a été immédiat et les insoumis-es du parc Mistral, renforcé-e-s par de nombreux vivres et sourires, tiennent bon malgré le froid. Ils/elles sont décidé-e-s à résister coûte que coûte à leur expulsion et à empêcher que l’on vienne les dénicher de leurs arbres. Grâce au soutien de personnes au sol, la pose de barrières métalliques autour du parc a pu être empêchée plusieurs jours de suite en décembre. L’expulsion des occupant-e-s des arbres, aussi bien techniquement que politiquement, risque maintenant de s’avérer extrêmement problématique pour les élu-e-s et la police grenobloise. Il faut aussi souligner que cette action arrive dans un contexte où les espaces occupés se multiplient à Grenoble avec de nombreux squats regorgeant d’activités, le théâtre Rio pris par des intermittent-e-s depuis quelques semaines, ou la fac en novembre dernier. […]
Ce type de campement d’action permanent pour protéger un site ou empêcher un grand projet, et notamment l’utilisation d’un village aérien, a encore relativement peu été expérimenté en France. La lutte du parc Mistral peut donc créer un précieux terrain d’apprentissage et d’échanges. Ceci dans un contexte où des campements d’action de ce type, qui ont pu aider à créer des rapports de force conséquents au cours de la dernière décennie dans d’autres pays européens – en Angleterre notamment avec le mouvement des « road protests » –, pourraient être envisagés pour empêcher la construction de nouvelles prisons, centres de rétention, supermarchés, routes et autres centrales nucléaires…
Cette action est en outre source, de par sa spécificité, de multiples liens et échanges positifs avec les habitant-e-s de la ville, liens ici extrêmement riches et souvent par ailleurs négligés dans les dynamiques d’actions directes.
Alors reste à faire en sorte de rejoindre les occupant-e-s du parc ou de multiplier cette expérience en d’autres lieux !